Lettre page 1

67S17_1916_02_23_3_lettre_page_01.jpg
Lecture par M. Laurent ROBERT, comédien, ancien étudiant de l’ERAC.
Mots clés : vie quotidienne, alimentation, cadeaux, zeppelin

 


 

 

Le front, le 23 février 1916,

 

Bien chers Parents,

 

Je vous donne de nouveau de mes bonnes nouvelles et pour signaler des faits très importants dont on a pu s’offrir gratuitement. Hier, dans l’après-midi une escadrille d’avions allemands traversaient nos lignes et allaient repérer et bombarder quelques villes non loin du front. Tandis que l’artillerie battait son plein au retour de leur excusions, 2 avions ont étés atteints et s’abattaient non loin de nos cantonnements.

Enfin vint l’heure de la soupe, chacun mangeant à qui mieux mieux, puis grillant quelques cigarettes ou façonnant des bagues, puis voici la nuit venue l’on se couche. Quelques copains qui s’étaient attardés pour jouer à la manille, l’un d’eux sort pour satisfaire quelques besoins, il nous avertit que les projecteurs éclairaient le ciel. L’on se précipite au même moment et l’on aperçoit dans le ciel un nuage de forme allongée. C’était un Zeppelin qui ayant pu traverser nos lignes se dirigeait vers Saint

Menehould. L’artillerie se met à donner. Tout-à-coup on aperçoit un obus qui le frappe en arrière. Le dirigeable fait un quart de cercle sur place, puis reprend sa route, toujours à la même hauteur, environ 1300 mètres. Mais les avions commençaient à l’entourer et lui lançait des fusées incendiaires par-dessus la tête et tandis que les mitrailleuses crachaient avec le concours des obus, mais le géant des airs continuait sa route. Enfin, l’ayant perdu de vue par la clarté des projecteurs qui se croisaient et par le froid qui se faisait sentir, on rentre se coucher à nouveau. Tout à coup, on entend crier des bravos et l’on se précipite de nouveau dehors. Qu’aperçoit-on ? Une grande flamme illuminait le ciel.

C’était notre monstre aérien qui atteint par un obus et une fusée avait pris feu. On pousse tous en chœur un bravo, et on était soulagé d’un nouvel ennemi. Ce matin, d’après les renseignements parvenus, il y a eu 29 victimes du dit zeppelin qui étaient carbonisées et l’appareil en cendre sauf la ferraille.

Aujourd’hui, un nouveau raid d’aviation ont survolés sur nous sans trop faire de dégâts quelques boucles dans la plaine et des fléchettes. Espérons que leurs camarades viennent nous rendre de nouveau visite et que notre meilleur accueil leur est toujours réservé.

 

Suite et fin

J’ai préparé un tout petit colis que je vais expédier en même temps. Il se compose de ma montre, d’un porte-plume et de 2 bagues.

La montre dès que nous monterez à Grasse, vous la donnerez à Mme Daver pour la nettoyer car en couchant dans la paille, en faisant des corvées, elle s’est encrassée de poussière et elle s’est arrêtée, donc il n’y a qu’à la faire nettoyer. J’attends de toucher mon « prêt » et je vous enverrais de l’argent si les fonds sont sensibles. Quant au porte-plume, vous trouverez 2 balles, l’une qui a sa plume et l’autre, c’est pour le crayon.

Si Fabius le désire, vous le lui donnerez s’il a bien travaillé à l’école.

Quant aux bagues, vous les mettrez de côté et si parmi vous tous l’une des deux vous vont très bien, mettez-la.

Enfin, je ne vois plus rien pour le moment qu’à nous embrasser tous étroitement, espérant vous lire prochainement, mes meilleures caresses.

 

Hervé

Aucun commentaire