Liquider la guerre, l'Épuration
Entre soif de vengeance et désir de justice, la chasse aux « collaborateurs » est lancée dès les premiers jours de la Libération. A Cannes, les groupes F.F.I. mais aussi la sécurité militaire et la 18e brigade mobile opèrent, en ordre dispersé, à des centaines d’arrestations parfois arbitraires : un rapport de l’état-major fait mention de plus de 300 arrestations entre la Libération et le 1er septembre 1944. Une commission d’épuration mixte, civile et militaire, regroupant membres des F. F. I. et du comité local de libération, est chargée de centraliser la répression, depuis l’hôtel Cavendish où elle tient sa permanence. Les détenus sont internés, quant à eux, à l’hôtel Montfleury, ancien siège de la Gestapo, dans des conditions d’hygiène déplorables. La surpopulation et la lenteur du processus d’épuration incitent le préfet à instituer une commission de triage chargée d’examiner rapidement les dossiers des détenus pour suggérer le maintien de la détention, la relaxe, la mise en résidence surveillée ou le renvoi devant les tribunaux. A l’épuration politique et administrative qui touche les employés municipaux et les forces de l’ordre, s’ajoutent des mesures prises à l’égard des entreprises accusées de collaboration. Dans ce climat de suspicion ambiant, les règlements de comptes s’étendent aux italiens soupçonnés de sympathies ou d’activisme fasciste, victimes pour leur part d’attentats à la bombe, notamment boulevard d’Italie, avenue Jourdan et avenue Francis Tonner.
- 0 Cannois jugés par la cour de justice ou la chambre civique de Grasse (7% des prévenus azuréens)
- 0 Cannois suspendus de leurs droits de vote, d’élection et d’éligibilité (par arrêt en date du 24 avril 1945 de la Chambre civique, section de Grasse)
- 0 agents de la police ralliés à la politique de Vichy, 11 sanctions proposées par le comité de libération de Cannes
- 0 collaborateurs condamnés à une peine supérieure à cinq ans de réclusion
- 0 comptes bancaires bloqués par le comité de libération de Cannes (notables internés ou en fuite)
Dissoute le 2 septembre 1944, car jugée trop lente, la commission de triage est réinstallée deux mois plus tard à la demande du sous-préfet de Grasse avec à sa tête maître Brochard. Le 20 décembre, la présidence est confiée une nouvelle fois au juge Feltz. De fortes dissensions entre le comité local de libération et la commission sur le rôle de ces deux juridictions d’exception dans l’instruction des dossiers, pousse le juge Feltz à démissionner le 15 février 1945.
En 1945, l’hôtel Montfleury devient officiellement centre d’internement de la rive droite du Var et enregistre plus de 900 internés suite au transfert des pensionnaires du Fort Carré d’Antibes. En raison de son fonctionnement actif, le centre rencontre d’importantes difficultés financières. La commission d’épuration pourvoit seule au ravitaillement des détenus en couverture, nourriture, charbon et bois de chauffage.
La presse collaborationniste subit elle aussi des mesures répressives.
Le docteur Picaud demande à ce que les fonds des entreprises allemandes qui ont participé à la construction du mur de la Méditerranée soient bloqués.
Afin de calmer les esprits, à la demande de ses habitants, le boulevard d’Italie est renommé boulevard de la République par délibération du 5 avril 1945.