Lettre du 14 mars 1915

Lettre du 14 mars 1915
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(cote 67S7)

Lecture par M. Grégor DARONIAN, comédien, ancien étudiant de l’ERAC.
Mots clés : description des combats, cadavres, alimentation

Le 14 mars 1915,

 

Chers Parents,

Je vous écris avec empressement pour vous remercier de l’attention que vous avez eu pour moi.

J’ai reçu votre lettre du 22 février qui contenait la p’tite somme de 5 francs.

Je l’ai reçu hier à 10 heures du matin dans les guitounes, en 2e ligne où nous sommes. C’est au milieu des obus éclatants et des sifflements de balles et ce n’est pas trop amusement d’écrire au milieu du fracas qui se propage.

Ces jours-ci, dans la nuit, il a fallu faire une corvée que c’est malheureux. Je vous le dit car je ne croyais jamais de faire un tel métier. Il a fallu creuser des tranchées pour enterrer ces malheureux soldats tombés dans les derniers combats de février. On en compte non seulement par dizaines, mais aussi par centaines. Nous nous sommes rendus à un endroit où il y avait une mer de morts, des charretées de croix, dans le brouillard, c’est pénible, on en couvre un, on en sort deux, on y voit rien dans ces nuits de brouillard, au milieu de balles.

Enfin, après la corvée, on est couché dans ces baraques sous terre, un peu de paille sur les branches et on couche là. On mange pas trop bien car le ravitaillement se fait la nuit et il n’y en a pas trop. Ah !

Qu’ils sont heureux les gens qui sont dans le midi, insouciant de cette guerre car on voit rien.

Il faudrait voir ces parages les routes défoncées, de la boue jusqu’au genou, toujours les pieds humides. Ah ! Quelle vue !

Vous m’excuserez l’écriture car c’est sur le sac que je fais cette lettre et ce n’est pas trop commode.

Enfin, j’espère que ma lettre vous trouvera en meilleure santé que ces temps derniers.

Je ne sais pas quand ces opérations seront terminées, mais on commence par en avoir assez.

Je souhaite que nous terminions au plus tôt et que ça cesse, pour retourner dans nos beaux pays du midi.

Recevez mes chers parents mes amitiés les plus tendre et vous embrasse tous étroitement.

 

Hervé Lambert.

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